Jean-Pierre Fabre et les « zémidjan », une curieuse relation

©liinformateur.net – 29 mai 2020 – 07h45 (Lomé)

Le patron de l’Alliance Nationale pour le Changement a reçu mercredi une visite dite « inopinée » des conducteurs de taxi-moto à son domicile à Kodjoviakopé. Ces derniers seraient allés lui renouveller leur soutien et profité de la rencontre pour lui offrir un dispositif de lavage de main. Ce n’est pas tant le geste qui intéresse ici mais le contexte de la visite.

Au Togo, nulle n’ignore que l’un des réservoirs de voix de Jean-Pierre Fabre ce sont les conducteurs de taxi-moto, les fameux « zémidjan » comme on les appelle dans la langue locale du sud du pays. Ils font la pluie et le beau temps au pays, et tout politique lorgne sur leur soutien. Gagner le cœur des « Z-men » c’est déjà disposer d’au moins cinq cent mille voix gratuitement (on estime leur nombre entre 400 et 600 mille au Togo). Et qui ne sait pas qu’ils sont de bons éléments pour le relais de l’information. Un seul « zémidjan » conquis, c’est peut-être 10 ou 20 personnes de gagner. Voilà pourquoi le leader de l’ANC était naguère très envié par ses compères de l’opposition qui feraient tous les sacrifices pour lui ravir ce soutien.

Qu’une poignée de « zémidjan » soit allé renouveller son soutien à Jean-Pierre Fabre dans le contexte actuel paraît tout de même assez curieux. Bien sûr M. Fabre n’a pas boudé son plaisir et c’est en bon politique qu’il a abreuvé ses hôtes d’un discours sur son intégrité et incorruptibilité. Il appartiendra à ces visiteurs d’en apprécier la justesse. Ce qui est plutôt curieux c’est le timing de l’opération. Il n’y a aucune élection immédiate en vue, alors quel sens revêt cette visite des « zémidjan » au Maire du Golfe 4 ?

On pourrait même pousser la curiosité plus loin pour se demander si ces conducteurs de taxi-moto sont véritablement des militants sur qui il faut compter pour les combats électoraux. Eux qui n’ont pas hésité à lâcher celui qu’ils sont retournés aduler aujourd’hui lors de la présidentielle du 22 février dernier. Jean-Pierre Fabre n’a recueilli qu’un minable 4%. Or le réservoir de voix que constituent les taxi-moto est plus concentré dans le grand Lomé, fief de l’opposant, mais c’est dans cette partie qu’il s’est fait le plus sèchement battre par un autre leader politique. En conclusion, ses amis « zémidjan » l’ont abandonné pour un plus offrant. Même si l’issue de cette présidentielle est restée la même.

Il faut donc questionner la fidélité politique de ce corps de métier. Certes ils sont très bons pour faire le macadam ou pour animer les meetings politiques, mais comme on dit chez nos voisins de l’Est, « le peuple des meetings n’est pas le peuple des urnes ». Ce corps de métier aussi a prouvé qu’il recherche un autre discours et une autre méthode de conquête du pouvoir. Jean-Pierre Fabre doit en tirer les conséquences et ne plus croire que l’amitié politique de ses amis lui est à nouveau acquise. Il doit travailler à une reconquête sinon, aux législatives de 2023 il pourrait encore prendre une nouvelle raclée politique.

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