Guinée – Célou Dalein Diallo : boycotter les législatives pour aller à la présidentielle, quelle logique ?
©liinformateur.net – 07 septembre 2020, 13h57 (Lomé) – En Guinée, le chef de file de l’opposition, Célou Dalein Diallo annonce qu’il sera bien candidat à la présidentielle du 18 octobre prochain. Cette annonce coupe court à plusieurs jours d’interrogation au sein du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) sur une éventuelle participation de l’opposition à la présidentielle. Même si la décision du leader de UFDG ne surprend pas grand monde, elle interroge dans un contexte où l’opposition a boycotté les dernières législatives pour ensuite vouloir participer à une présidentielle régie par une constitution issue de ces législatives.
Sa décision était très attendue, finalement Célou Dalein Diallo a mis fin au suspens en annonçant qu’il se présenterait à la présidentielle du 18 octobre prochain. Sollicité par son parti politique, l’Union des Forces Démocratiques de Guinée, le chef de file de l’opposition a mis quatre jours pour donner sa réponse favorable. Pour la troisième fois consécutive, Célou Dalein Diallo sera candidat à la présidentielle et pour la troisième fois il affrontera un certain Alpha Condé, candidat du parti au pouvoir RPG Arc-en-ciel. Une question se pose toutefois à la suite de cette annonce : quid du combat contre un troisième mandat d’Alpha Condé ?
Aux dernières élections législatives et référendaires de mars dernier, l’opposition guinéenne réunie au sein du Front National pour la Défense de la Constitution avait choisi le boycott. La stratégie était claire, isoler Alpha Condé dans son aventure d’une nouvelle constitution qui allait déboucher sur un troisième mandat. L’opposition voyait juste ; Alpha Condé est effectivement candidat à un troisième mandat après l’adoption d’une nouvelle constitution. L’opposition se retrouve alors à la croisée des chemins : aller ou ne pas aller ?
« L’objectif, c’est d’éviter de rejouer le scénario de mars dernier », a expliqué un cadre de l’UFDG à la désignation du candidat du parti. La stratégie du boycott n’a pas porté de fruits ; non seulement l’opposition n’a pas empêché l’adoption de la nouvelle constitution, mais elle a surtout perdu toute emprise sur le parlement par l’acte de boycott. Aujourd’hui, le parlement guinéen ne compte plus aucun parti de l’opposition. Il se pose alors l’épineuse question de la poursuite du combat face à un pouvoir que rien n’arrêtera.
Pour l’opposition guinéenne, le dilemme est inextricable. Entre la promesse faite aux guinéens de poursuivre le combat et l’attrait de la présidentielle pour continuer par exister, il n’a pas été aisé de choisir. Et c’est désormais fait, Célou Dalein Diallo se jette à l’eau, mais pour quelle garantie de victoire ?
Donné deux fois perdant face à ce même Alpha Condé qu’il va à nouveau affronter, le leader de l’UFDG n’a aucune garantie de remporter la victoire cette fois également. Cette candidature viserait plutôt à déplacer la contestation de la rue vers le terrain électoral, selon nombre d’analystes. Dalein Diallo est plus conscient que quiconque qu’il n’a aucune chance de battre Alpha Condé dans les urnes d’autan que ce dernier a pris le temps de verrouiller le système électoral en sa faveur.
Pire en face, beaucoup de guinéens trouvent que Célou Dalein Diallo a trahi en se portant candidat. Le FNDC dont son parti est membre a mené toutes ses actions avec la logique de boycott de toute action électoraliste. se porter candidat est vécu comme une sorte de trahison de la cause défendue par de nombreux guinéens dont certains y ont même laissé la vie.
Il est difficile de comprendre comment un leader politique peut avoir boycotté les élections législatives qui lui auraient donné une certaine assise parlementaire pour contrôler l’action du gouvernement, et se porter candidat à la présidentielle. Difficile de comprendre la logique de l’UFDG et de son leader d’autant qu’entre temps, aucune condition n’a changé pour que le parti puisse espérer une victoire ou du moins un certain contrôle du jeu électoral.
Cette candidature ne risque-t-elle pas de faire perdre des plumes à Célou Dalein Diallo ? La masse populaire n’est jamais acquise indéfiniment et les retournement de veste peuvent se payer cash. Au Togo, Jean-Pierre Fabre l’a appris à ses dépens;
Célou n’aurait jamais pu candidater pour la troisième fois de suite à la présidentielle si la limitation du nombre de participation aux scrutins était limité. Cela dit, il faut en finir avec ce dogme sur la limitation du nombre de mandats qui est aux antipodes de la démocratie.